Livestock Research for Rural Development 26 (12) 2014 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Préférences alimentaires des ovins: appétence des principales espèces de ligneux fourragers au sud-est du Mali

H Nantoumé, S Sidibé, S Cissé, D Cinq-Mars1, A Kouriba2, A Sanogo3, A Olivier et J Bonneville

Institut d’Economie Rurale, Rue Mohamed V, BP 258, Bamako, Mali
hamidou.nantoume@yahoo.fr
1 Université Laval, Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation, 2425, rue de l’Agriculture, Québec, G1V 0A6, Canada
2 Comité National de la Recherche Agricole, Bamako, Mali
3 Centre d’Etude et de Coopération Internationale, Hamdallaye ACI 2000, BP 109, Rue 395, Porte 180, Bamako, Mali

Résumé

Pendant la saison sèche, les fourrages ligneux occupent une place essentielle dans l’alimentation des ruminants au Mali. Cependant, des études ont montré que plusieurs espèces renferment des substances anti-nutritionnelles qui affectent leur appétence, leur ingestion, leur digestibilité et donc les performances des animaux qui les ingèrent en grande quantité. Cette étude a évalué et classé les espèces locales de ligneux fourragers en fonction des préférences des ovins dans 4 villages de la commune de Zan Coulibaly au Mali. Le matériel animal comportait 20 béliers Djallonké, entiers, âgés de 12 à 18 mois et alimentés de 500 g/jour des 5 espèces Pterocarpus erinaceus, Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus lucens, Khaya senegalensis et Terminalia macroptera. La composition chimique, l’ingestion et l’indice de préférence des cinq espèces de ligneux fourragers ont été déterminées.

 

L’ingestion moyenne totale a été de 643 g/j par animal et a varié en fonction de l’espèce du ligneux. Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus erinaceus, puis Pterocarpus lucens ont été les plus ingérés. L’indice de préférence le plus élevé a été celui du Ficus gnaphalocarpa et le plus bas celui du Khaya senegalensis et du Terminalia macroptera. Aussi, ces trois espèces (Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus erinaceus et Pterocarpus lucens) ont été sélectionnées comme les plus appétées et retenues comme constituants des rations de production de viande et suppléments alimentaires des ovins pendant la saison sèche.

Mots clés: commune de Zan Coulibaly, composition chimique, ingestion, ligneux fourragers, mouton, préférence



Feed preferences of sheep: palatability of the main browse/tree fodder species in the southeastern part of Mali

Summary

During the dry season, browse/tree forage species play an essential function as ruminants’ feed. Most of the browse/tree forages keep their green leaves during a large part of the dry season. However, some studies have shown that the browse/tree forages contain some antinutritional factors that affect their palatability, intake and digestibility and therefore performances of animals ingesting large proportions. The objective of this study was to evaluate and classify the locale browse/tree species as related to preferences of sheep. Four villages, Wolodo, Dogoni, Dangakoro and Sokouna from the commune of Zan Coulibaly were used as experimental sites. The animal material included twenty 12-18 month old dwarf Djallonké sheep, non castrated, fed with 500 g/day of green leaves of the five plant species: Pterocarpus erinaceus, Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus lucens, Khaya senegalensis and Terminalia macroptera.

 

Average feed intake was 643 g/day/animal and varied among the browse/tree species. Ficus gnaphalocarpa was the most ingested and the most palatable species, followed by Pterocarpus erinaceus then Pterocarpus lucens. The three species: Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus erinaceus and Pterocarpus lucens were recognized as the preferred ones by the sheep and, therefore, are recommended for use as component of the sheep fattening rations or as feed supplements during the dry season.

Keywords: browse/tree forages, commune of Zan Coulibaly, chemical composition, intake, palatability


Introduction

Au Mali, les pâturages constituent la base de l’alimentation des animaux. Ces pâturages connaissent une double fluctuation (qualitative et quantitative) au cours des saisons, dont la durée et les caractéristiques varient en fonction des zones bioclimatiques.

 

En zone soudanienne par exemple, où l’étude est conduite, la saison pluvieuse, qui dure de juin à octobre, est caractérisée par des fourrages abondants et de bonne qualité. En saison sèche froide (novembre à février), les pâturages restent disponibles en quantité suffisante mais ont une valeur alimentaire moindre à cause de la lignification des plantes. Pendant la saison sèche chaude (mars à mai), la quantité et la qualité des pâturages deviennent faibles.

 

La plupart des pailles de graminées des pâturages tropicaux et certains résidus de céréales sont pauvres en protéines pendant toute la saison sèche alors que les ligneux fourragers occupent une place importante dans l’alimentation des ruminants. La plupart des espèces de ligneux fourragers conservent des feuilles vertes pendant une bonne partie ou toute la saison sèche (Hiernaux et al. 1994). De plus, ces feuilles vertes et d’autres organes comme les jeunes rameaux, les inflorescences et les fruits également prélevés par le bétail ont des teneurs en nutriments, particulièrement en azote, qui restent élevées durant la saison sèche (Sangaré, 2005). Cependant, des études ont montré que plusieurs de ces fourrages ligneux renferment des substances anti-nutritionnelles qui affectent leur appétence, leur ingestion et leur digestibilité et par conséquent les performances des animaux qui les ingèrent en grandes quantités.

 

La préférence ou appétence est un phénomène complexe influencé par les facteurs de l’animal, de la plante et de l’environnement. Marten (1978) définit la préférence comme étant les caractéristiques de la plante, de l’animal et de l’environnement stimulant une ingestion sélective de l’animal lorsqu’il se trouve en présence de deux ou plusieurs fourrages. Ces caractéristiques peuvent être décrites en termes d’acceptabilité, de préférence ou d’ingestion sélective conditionnée par des impulsions sensorielles. Cependant, Stuth (1991) fait une différence entre appétence et préférence. Selon cet auteur, l’appétence est liée aux facteurs inhérents à l’espèce de plante qui élucident une réponse sélective par l’animal alors que la préférence fait intervenir le choix proportionnel d’une espèce de plante entre deux ou plus et est essentiellement d’ordre comportemental. Le choix de l’espèce fourragère constituante de la ration devient alors primordial pour une meilleure extériorisation des performances des animaux qui les ingèrent.

 

L’objectif de cette étude est de déterminer la composition chimique, y compris les substances anti-nutritionnelles, l’ingestion de MS et l’indice de palatabilité des principales espèces locales de ligneux fourragers afin de les classer sur la base de la préférence relative des ovins dans le but de choisir les aliments constituant la ration future.


Matériel et méthodes

Une étude antérieure réalisée par Nantoumé et al. (2014), menée sous forme d’enquête auprès des agropasteurs de la commune rurale de Zan Coulibaly, a permis d’identifier cinq espèces autochtones de ligneux fourragers qui offraient un potentiel prononcé comme aliments des ovins. Dans la présente étude, il s’agit de déterminer la préférence relative des ovins pour ces cinq espèces fourragères déjà présélectionnées par les agropasteurs.

 

Matériel

 

Sites de l’étude

 

Suite aux résultats obtenus lors de la première étude conduite sous forme d’enquête et validés par le comité de suivi évaluation et l’assemblée générale, quatre villages de la commune de Zan Coulibaly, en région de Koulikoro, au sud-est du Mali, ont été retenus pour abriter le test de préférence des ovins pour les espèces locales de ligneux fourragers. Ces villages sont Wolodo, Dogoni, Dangakoro et Sokouna.

 

Matériel animal

 

Le matériel animal comportait 20 béliers Djallonké, entiers, âgés de 12 à 18 mois comme l’attestait la présence des 2 pinces d’adulte (Wilson and Durkin 1984). Les animaux ont été achetés à Konobougou, le marché à bétail le plus important de la zone. Ces animaux ont été répartis en raison de 5 par village et d’un bélier par agropasteur, plus précisément à 3 femmes et 2 hommes par localité.

 

Matériel végétal

 

Le matériel végétal (espèces fourragères à tester) était constitué de 5 espèces autochtones de ligneux fourragers (Figure 1): Pterocarpus erinaceus (palissandre du Sénégal), Ficus gnaphalocarpa (sycomore), Pterocarpus lucens, Khaya senegalensis (caïlcedra) et Terminalia macroptera (badamier sessile), retenues à partir des résultats de l’enquête.

Figure 1. Espèces fourragères testées dans les rations alimentaires des ovins à Zan Coulibaly, au Mali

Méthodes

 

Les béliers ont été logés individuellement dans des abris de 16 m2 et disposaient chacun de cinq mangeoires pour l’affouragement des cinq espèces fourragères (Figure 2). Les moutons étaient alimentés de la même quantité (500 g) de feuilles fraîches de chacune des espèces fourragères collectées sous forme de branchettes à la veille de la distribution. Les branchettes étaient effeuillées le matin, juste avant la distribution. Les feuilles de chaque espèce ont été distribuées chaque matin de façon aléatoire dans les cinq mangeoires de manière à éviter le reflexe orienté par le goût d’un fourrage donné. Les quantités offertes et les reliquats ont été pesés quotidiennement pour déterminer les quantités de fourrages ingérées. Les béliers ont été abreuvés 2 fois par jour. Les animaux ont été pesés au début et à la fin du test. Le test a duré neuf jours.

 

Des échantillons de chaque espèce fourragère offerte aux moutons ont été prélevés chaque jour dans chaque village pour analyse. La préparation des échantillons a suivi plusieurs étapes. Tout d’abord, les 180 échantillons (5 espèces * 9 jours * 4 villages) collectés au cours de ce test de cafétéria ont été séchés à l’air libre. Ensuite, ces échantillons ont été regroupés par espèce de ligneux fourragers et par village. Vingt échantillons ont été obtenus, desquels 20 sous-échantillons homogènes ont été prélevés.

Chaque sous-échantillon a fait l’objet d’une analyse chimique. Les déterminations ont porté sur la matière sèche (MS), les cendres, les protéines brutes (PB), la cellulose brute (CB), la matière grasse (MG), l’énergie brute, les fibres (NDF et ADF) et les tanins. Ces analyses ont été effectuées selon les méthodes AOAC (2005) au Laboratoire de Nutrition Animale de l’Institut d’Economie Rurale (IER), Bamako, au Mali  et à l’Université Laval de Québec, au Canada.

 

L’indice de préférence relative des différentes espèces a été déterminé selon la procédure décrite par Salem et al (1994) pour une durée totale du test de neuf jours répartie en trois périodes égales de trois jours chacune. Les périodes considérées ont été les suivantes P1 (jours 1-3), P2 (jours 4-6), P3 (jours 7-9) et P4 (jours 1-9). Les moyennes des quantités offertes et des reliquats de chaque espèce fourragère ont été déterminées. L’indice de préférence relative, qui décrit la préférence de chaque espèce par rapport à Pterocarpus erinaceus, a été calculé comme suit : I1=(Cfg/Ofg)/(Cpe/Ope), I2=(Cpl/Opl)/(Cpe/Ope), I3=(Cks/Oks)/(Cpe/Ope) et I4=(Ctm/Otm)/(Cpe/Ope) où I1, I2, I3 et I4 représentent respectivement l’indice de préférence relative de F. gnaphalocarpa, P. lucens, K. senegalensis et T. macroptera par rapport à P. erinaceus. Le Pterocarpus erinaceus a été choisi comme espèce de référence parce qu’elle a été classée première selon la perception des agropasteurs suite à l’étude de Nantoumé et al. (2014). Les lettres majuscules C et O représentent respectivement les quantités consommées et offertes. Les lettres minuscules représentent les noms des espèces fourragères (fg = Ficus gnaphalocarpa, pe = Pterocarpus erinaceus, pl = Pterocarpus lucens ; ks = Khaya senegalensis et tm = Terminalia macroptera).  Après l’analyse de la variance (SAS 2006), les espèces fourragères ont été classées par ordre de « préférences animales » sur la base de leur composition chimique, quantité de MSI et indice de palatabilité.  


Résultats

Détermination de la composition chimique des espèces fourragères

 

Les résultats d’analyse ont été soumis à une analyse de variance par SAS (Tableau 1). La teneur en MS a été significativement plus élevée (P<0,05) pour le P. lucens que pour trois des quatre autres espèces et significativement plus basse (P<0,05) pour le F. gnaphalocarpa que pour deux des autres espèces. Le taux de matière organique (MO) a été significativement plus élevé (P<0,05) pour le Terminalia macroptera que pour le Khaya senegalensis et le Ficus gnaphalocarpa. Le Pterocarpus lucens et le Pterocarpus erinaceus ont obtenu des teneurs intermédiaires et similaires entre elles. La teneur en cendres a été significativement plus élevée (P<0,05) pour le F. gnaphalocarpa. Le Pterocarpus erinaceus et le Khaya senegalensis ont une teneur significativement plus élevée (P<0,05) en cellulose brute que le Terminalia macroptera et le Ficus gnaphalocarpa. Le taux de protéines brutes a été plus élevé pour le P. erinaceus que pour toutes les autres espèces sauf le P. lucens. Le Pterocarpus lucens a une teneur en énergie significativement plus élevée (P<0,05) que celle de toutes les autres espèces sauf le K. senegalensis, alors que le Ficus gnaphalocarpa a la teneur en énergie la plus faible avec 3489,2 kcal/kg de MS.  La matière grasse se caractérise par une basse teneur pour les cinq espèces de fourrages ligneux. Les fibres (NDF et ADF) sont significativement plus élevées (P<0,05) pour le P. erinaceus et le K. senegalensis alors que le F. gnaphalocarpa est significativement plus riche (P<0,05) en tanins.    

Tableau 1 : Composition chimique des ligneux fourragers utilisés au cours du test de cafétéria dans la commune de Zan Coulibaly

K. senegalensis

P. lucens

P. erinaceus

F. gnaphalocarpa

T. macroptera

Ecart type

p

Matière sèche, % MB

37,6ab

41,8a

34,8bc

29,6c

33,6bc

1,42

0,0008

Cendres, % MS

9,3b

4,9bc

6,9bc

14,5a

4,1c

1,03

0,0008

Cellulose brute, % MS

36,9a

33,0ab

38,6a

29,1bc

27.0c

1,34

0,0002

Protéine brute, % MS

11,2c

15,4ab

16,0a

12,2b

11,0c

Matière grasse, % MS

2,2

2,4

2,6

2,0

2,4

0,15

0,15

Energie, kcal/kg MS

4308ab

4544a

4160b

3489c

4043b

73,1

0,0001

MO, % MS

90,7b

95,1ab

93,1ab

85,4c

95,9a

1,03

0,0001

NDF, % MS

47,8a

39,0b

50,2a

30,0c

31,7c

ADF, % MS

34,0a

27,8b

34,2a

18,9d

24,4c

Calcium, % MS

1,17

0,89

1,09

1,46

0,70

Phosphore, % MS

0,15

0,81

0,82

0,19

0,11

Tanins g/kg MS

0,61d

4,27b

1,40c

8,86a

0,03e

* MB = matière brute ; MS = matière sèche ; MO = matière organique ; NDF = Neutral detergent fiber ; ADF = acid detergent fiber ; Pr = probabilité;
** a, b, c, d: Les valeurs d’une même ligne suivies de la même lettre ne sont pas différentes au seuil de 5%.
Ingestion de matière sèche

 

Les béliers ont été alimentés d’une même quantité (500 g de MB/animal/jour) de chacune des cinq espèces ligneuses fourragères locales comme décrit dans le chapitre « Matériel et méthodes ». La quantité moyenne de matière sèche totale ingérée a été de 643,46 g/animal/jour (Tableau 2). Rapporté en % de poids vif des ovins, cette consommation est de 2,36 kg par 100 kg de poids vif. La répartition de cette quantité de MS ingérée aux différentes espèces fourragères fait ressortir le F. gnaphalocarpa, avec 189,38 g, comme la plus consommée (P<0,05) des cinq plantes.

Tableau 2 : Ingestion (g/animal/jour) de MS des 5 espèces de ligneux fourragers utilisées au cours du test de cafétéria dans la commune de Zan Coulibaly

Pterocarpus erinaceus

Ficus gnaphalocarpa

Pterocarpus lucens

Khaya senegalensis

Terminalia macroptera

ET

p

Total

Wolodo

160*

198

131

117

134a

739a

Dogoni

152

193

112

103

129a

690ab

Sokouna

140

189

104

94

85ab

611ab

Dangakoro

130

177

100

61

66b

533b

Ecart type

10,8

13,1

17,8

25,6

17

26,51

Probabilité

0,262

0,719

0,618

0,487

0,041

Moyenne

145b

189a

112c

94c

103c

8,25

0,0001

643

ET = écart type
* a, b, c: Les valeurs d’une même colonne suivies de la même lettre ne sont pas différentes au seuil de 5%. Les valeurs de la dernière ligne suivies de lettres différentes sont différentes au seuil de 5%.

Indice de préférence des espèces par rapport à Pterocarpus erinaceus en fonction de la période

 

Pour toutes les espèces locales de ligneux fourragers, l’indice de préférence n’a pas varié (P>0,05) en fonction de la période (Tableau 3). Numériquement, les valeurs sont très proches les unes des autres, surtout pour les espèces fourragères comme P. erinaceus, F. gnaphalocarpa et P. lucens. Cependant, pour le K. senegalensis et le T. macroptera, bien que statistiquement similaire (P>0,05), la différence entre la valeur la plus élevée et la plus basse est supérieure à 26% pour T. macroptera et 36% pour K. senegalensis.  La moyenne de l’indice de préférence de toute la durée de l’expérimentation a varié (P<0,05) en fonction de l’espèce fourragère. Elle est plus élevée (P<0,05) pour le Ficus gnaphalocarpa, suivie par celles du P. erinaceus et du P. lucens.

Tableau 3 : Indice de préférence des espèces fourragères par rapport à Pterocarpus erinaceus

Indice de préférence

Période

Pterocarpus erinaceus

Ficus gnaphalocarpa

Pterocarpus lucens

Khaya senegalensis

Terminalia macroptera

P1 (jours 1-3)

1

1,18

1,01

0,55

0,67

P2 (jours 4-6)

1

1,13

0,97

0,75

0,72

P3 (jours 7-9)

1

1,09

0,93

0,71

0,57

P4 (jours 1-9)

1

1,15

0,99

0,65

0,69

Ecart type

0,0

0,12

0,13

0,12

0,08

p

-

0,964

0,974

0,634

0,606

Moyenne

1b

1,14a

0,97b

0,66c

0,66c

Indice de préférence des espèces par rapport à Pterocarpus erinaceus en fonction du village

 

 Pour toutes les espèces locales de ligneux fourragers, à l’exception de P. erinaceus, l’indice de préférence a varié (P<0,05) en fonction du village (Tableau 4). La moyenne la plus élevée pour les quatre villages est celle du F. gnaphalocarpa, suivie de celles de P. erinaceus et de P. lucens. L’indice le plus bas a été obtenu avec K. senegalensis et T. macroptera, qui ont une valeur presque identique.

Tableau 4 : Indice de préférence des espèces fourragères par rapport à Pterocarpus erinaceus

Indice de préférence

Village

Pterocarpus
erinaceus

Ficus
gnaphalocarpa

Pterocarpus
lucens

Khaya
senegalensis

Terminalia
macroptera

Dangakoro

1,00

1,02ab

1,11ab

0,42b

0,54b

Dogoni

1,00

1,21ab

0,74b

0,58b

0,62b

Sokouna

1,00

0,96b

0,78b

0,61b

0,87a

Wolodo

1,00

1,36a

1,28a

1,05a

0,61b

Moyenne

1,00b

1,14a

0,98b

0,67c

0,66c

* a, b, c: Les valeurs d’une même colonne suivies de la même lettre ne sont pas différentes au seuil de 5% pour les 4 périodes.
Les valeurs de la dernière ligne (moyenne) suivies de lettres différentes sont différentes au seuil de 5%.


Discussion

Le village n’a pas d’effet (P>0,05) sur les teneurs en MS, MO, CB, MG, EB et cendres des fourrages ligneux. Cependant, l’espèce de ligneux fourrager a un effet (P<0,05) sur la composition chimique. La teneur en MS a été significativement plus élevée (P<0,05) que celle de trois des quatre autres espèces pour le Pterocarpus lucens, la plus basse étant celle du  Ficus gnaphalocarpa. Ces résultats montrent que la teneur en MS des feuilles de ligneux fourragers est faible comparée à celle des aliments concentrés qui est au dessus de 90% en général. Cela signifie que des quantités plus élevées de ligneux fourragers sont nécessaires pour couvrir les besoins d’encombrement alimentaire des animaux.

 

Le taux de matière organique (MO) a été le plus élevé (P<0,05) pour le Terminalia macroptera, mais pas significativement différent de celui du Pterocarpus lucens et du Pterocarpus erinaceus, et le plus bas (P<0,05) pour le Ficus gnaphalocarpa. La connaissance de la composition en constituants organiques des aliments et de leur devenir dans le tube digestif de l’animal est à la base de l’expression de leur valeur nutritive (protéinique en protéines digestibles dans l’intestin (PDI) et énergétique (unité fourragère lait et viande (UFV, UFL)).

 

Le Pterocarpus erinaceus et le Khaya senegalensis ont une teneur plus élevée (P<0,05) en cellulose brute alors que le Terminalia macroptera a une teneur plus faible. La teneur en cellulose brute (CB) est un facteur important dans l’évaluation de la valeur nutritive des aliments car elle est déterminante de l’ingestibilité et la digestibilité. C’est pourquoi, selon INRA (2007), l’étude complète de la digestibilité des fourrages verts a permis de proposer des équations de prévisions basées sur la composition chimique exprimée en CB et matières azotées totales (MAT) ou protéines brutes. Pour les protéines brutes, leur disponibilité peut constituer un problème dans cette expérimentation sinon, la teneur minimale couramment admise de 8 % de MAT requises dans une ration conventionnelle est couverte par chacun des constituants.

 

L’espèce de fourrage ligneux n’a pas d’effet (P>0,05) sur la teneur en matières grasses. En général, il est connu que les fourrages ont un faible niveau en matière grasse.

Le Pterocarpus lucens a la teneur la plus élevée (P<0,05) en énergie, alors que le Ficus gnaphalocarpa arrive en fin de la liste.

 

Le Ficus gnaphalocarpa se distingue par sa teneur significativement plus élevée (P<0,05) en cendres. Le Khaya senegalensis détient la deuxième valeur, qui n’est pas différente de celles du Pterocarpus erinaceus et du Pterocarpus lucens. La plus faible teneur a été obtenue avec le Terminalia macroptera, qui n’est pas différente de celles des deux Pterocarpus.

 

F. gnaphalocarpa se caractérise par sa teneur élevée (P<0,05) en tanins. P. lucens se classe en deuxième position avec une teneur de moitié plus petite que celle du F. gnaphalocarpa. Deux facteurs interviennent dans la détermination des quantités de tanins consommées: la teneur en tanins par espèce (g/kg MS) et la quantité de MS par espèce. Sur cette base, pour F. gnaphalocarpa, avec une teneur de 8,86 g/kg MS (Tableau 1) et une ingestion de 189 g MS/jour (Tableau 2), la quantité quotidienne de tanins ingérée est de 1,68 g. Par cette méthode, la quantité totale de tanins ingérée à partir de toutes les espèces fourragères consommées est évaluée à 2,42 g/jour. Rapportée en %, la quantité de tanins ingérée par jour au cours de ce test est de 0,42 % de la MS. Cette valeur est de loin inférieure à la teneur de tanins qui provoque une réduction de la digestibilité de la matière sèche chez le bovin et l’ovin. Diagayete et Huss (1981) ont rapporté que le niveau de tanins qui affecte la digestibilité chez les bovins et ovins se situe entre 2 et 5 % de la ration. Les espèces fourragères utilisées dans ce test contiennent des teneurs relativement basses en tanins (0,003 à 0,88 %). Les quantités totales d’aliments ingérées ne permettent pas d’atteindre le seuil critique de tanins qui se situe entre 2 et 5 %. Par conséquent les rations ingérées au cours de ce test contenaient des teneurs en tanins tolérables par les ovins.     

 

L’ingestion de MS correspond à la norme admise des pays tropicaux qui est de 2 à 3 % de leur poids vif en MS, selon Rivière (1991). Cette ingestion a été répartie entre 5 espèces de fourrages ligneux qui ont été offertes pendant 9 jours. L’analyse statistique montre que l’espèce  la plus consommée est le Ficus gnaphalocarpa, qui représente 29,43 % de l’ingestion journalière. La deuxième espèce la plus consommée est le Pterocarpus erinaceus. Les 3 autres espèces, P. lucens, T. macroptera et K. senegalensis, ont une ingestion similaire.  

 

L’indice de préférence relative à P. erinaceus a permis d’effectuer un classement des 5 espèces fourragères. F. gnaphalocarpa occupait la première place, suivi par P. erinaceus et P. lucens. La période n’a pas d’effet (P>0,05) sur l’indice de préférence. En d’autres termes, une adaptation aux aliments n’est pas nécessaire s’il s’agit de comparer la préférence de plusieurs espèces. Cependant, d’autres chercheurs, Nantoumé et al (2001), Kaitho et al (1997) et Salem et al (1994) ont conclu qu’au moins cinq jours sont nécessaires pour déterminer l’ingestion à long terme des fourrages ligneux au cours d’un test de préférence. L’espèce du ligneux fourrager affecte l’indice de préférence, montrant que le classement par espèce suit le même ordre dans chacun des 4 villages où les tests ont été conduits. Fadiyimu et al (2011) ont trouvé des résultats d’indice de préférence variable en comparant 8 espèces fourragères. Les moutons de race Diallonké ont préféré Moringa oleifera d’abord suivi dans l’ordre par Aspilia africana, Gliricidia sepium, et Leucaena leucocephala, Spondia mombin, Ficus thonningii, Ficus exasperata et enfin Cassia siamea.   

 

Au cours de cette étude, la consommation moyenne générale a été de 643 ±  8.25 g/j par animal. Cette moyenne cache cependant une préférence variable pour les 5 espèces de ligneux fourragers utilisées.  Le Ficus gnaphalocarpa a été l’espèce la plus ingérée. La deuxième espèce la plus ingérée a été le Pterocarpus erinaceus et la troisième, le Pterocarpus lucens, bien qu’au seuil de 5 %, son ingestion est semblable à celle de Terminalia macroptera et Khaya senegalensis.

 

L’indice de préférence relative a suivi la même tendance que l’ingestion volontaire de MS, le Ficus gnaphalocarpa et les deux Pterocarpus se distinguant significativement des deux autres espèces. Or, le taux de protéines brutes a aussi été plus élevé pour le P. erinaceus et le P. lucens que pour les autres espèces.  


Conclusion


Remerciements

Ces travaux ont été réalisés grâce à une subvention du Centre de recherches pour le développement international (CRDI), établi à Ottawa, au Canada (www.crdi.ca), et à l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise d’Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada (le MAECD) (www.international.gc.ca).

Nos remerciements s’adressent également à tous ceux qui ont contribué à la réussite de cette étude, spécialement à Nancy Bolduc de l’Université Laval, aux agents de terrain du CECI et du KILABO, ainsi qu’aux agropasteurs partenaires et à leurs familles.


Références bibliographiques

AOAC (American Organization of Agricultural Chemists) 2005 Official methods of Analysis. Association of Official Analysis Chemists, Arlington, VA 957 p.

Diagayete M et Huss W 1981 Tannin content of African pasture plants: Effects of analytical data and in vitro digestibility. Animal Research and Development 15:79-90.

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Received 16 October 2014; Accepted 14 November 2014; Published 1 December 2014

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