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Effets du charbon activé à base des coques de Cocos nucifera sur les paramètres de digestibilité et la production du méthane in vitro du foin de Trypsacum laxum chez les petits ruminants

Séguédié Ronald Paulin, Taboumda Evariste, Lemoufouet Jules, Tendonkeng Fernand, Kana Jean Raphael et Fonteh Anyangwé Florence1

Département de Zootechnie, Faculté d’Agronomie et des Sciences Agricoles, Université de Dschang, B P 222 Dschang, Cameroun
seguedieronald9@gmail.com
1 Département de Zoologie, Faculté des Sciences, Université de Bamenda, B P 39 Bamenda, Cameroun

Résumé

L’étude portant sur les effets du charbon activé à base des coques de noix de coco sur les paramètres de digestibilité in vitro et la production du méthane du foin de Trypsacum laxum chez les ovins et caprins a été conduite d’Octobre à Décembre 2022 dans l’Unité de Recherche en Production et Nutrition Animales (URPRONAN) de l’Université de Dschang. Pour ledit essai, 4 rations ont été formulées contenant respectivement 0 ; 0,5 ; 1 et 1,5% de biochar de coques de noix de coco. Une chèvre et une brebis pesant 18±2 kg et âgées entre 18 et 20 mois ont servi de donneuses de liquide ruminal. Les résultats de cette étude révèlent qu’indépendamment de la source du liquide ruminal, le gaz produit (GP) après 24h d’incubation, l’énergie métabolisable (EM), les acides gras volatiles (AGV), de même que la digestibilité in vitro de la matière sèche (DIVMS) et de la matière organique (DIVMO) ont significativement (p<0,05) augmentés avec l’ajout du biochar à la ration de base. Les valeurs les plus élevées de ces paramètres (53,14 ml/500 mg ; 10,15 MJ/kg ; 1,21 mmol/40 ml ; 62,38 % ; 68,67%) chez les chèvres et (49,67 ml/500 mg ; 9,68 MJ/kg ; 1,12 mmol/40 ml ; 60,04% ; 65,59%) chez les brebis ont été obtenues avec la ration incubée avec 1% et de biochar. La présente étude montre que l’ajout du biochar à base des coques de noix de coco à la ration constituée de foin de Trypsacum laxum permet d’améliorer sa digestibilité chez les petits ruminants.

Mots clés : caprin, gaz, liquide ruminal, matière sèche, ovin, protozoaires


Effects of activated charcoal based on Cocos nucifera husks on digestibility parameters and in vitro methane production of Trypsacum laxum hay in small ruminants

Abstract

The study on the effects of activated charcoal made from coconut husks on in vitro digestibility parameters and methane production from Trypsacum laxum hay in sheep and goats was conducted from October to December 2022 in the Animal Production and Nutrition Research Unit (URPRONAN) of the University of Dschang. For said test, 4 rations were formulated containing respectively 0 ; 0.5 ; 1 and 1.5% coconut husk biochar. A goat and a sheep weighing 18±2 kg and aged between 18 and 20 months served as ruminal fluid donors. The results of this study reveal that independently of the source of the ruminal fluid, the gas produced (GP) after 24 hours of incubation, the metabolizable energy (ME), the volatile fatty acids (VFA), as well as the digestibility in vitro dry matter (DIVDM) and organic matter (DIVOM) significantly (p<0.05) increased with the addition of biochar to the basic ration. The highest values ​​of these parameters (53.14 ml/500 mg ; 10.15 MJ/kg ; 1.21 mmol/40 ml; 62.38% ; 68.67%) in goats and (49.67 ml/500 mg ; 9.68 MJ/kg ; 1.12 mmol/40 ml ; 60.04% ; 65.59%) in ewes were obtained with the ration incubated with 1% biochar. The present study shows that the addition of biochar based on coconut husks to the ration consisting of Trypsacum laxum hay makes it possible to improve its digestibility in small ruminants.

Key words: dry matter, gas, goat, protozoa, ruminal fluid, sheep


Introduction

La manipulation de l’écosystème microbien ruminal pour accroitre la digestibilité des aliments fibreux, réduire les émissions de méthane et de l’excrétion de l’azote par les ruminants pour améliorer leurs performances restent une préoccupation majeure pour les nutritionnistes (Bodas et al 2008). Ces derniers ont donc développé différentes stratégies pour améliorer l’utilisation digestive des aliments et réduire la production du méthane. Le choix s’est d’abord porté sur l’utilisation de certaines substances synthétiques ; puis depuis quelques années sur des substituts d’origine naturelle. Ces derniers sont des composés nutritifs ou non, aidant à améliorer l’efficacité de l’utilisation digestive des aliments et donc des performances de production des ruminants ; à l’instar des plantes entières, des extraits de plantes, des huiles essentielles et des charbons activés (Borazjanizadeh et al 2011 ; Mekuiko, 2018).

Le charbon activé est caractérisé par la présence des minéraux de charge variable et donc responsable de la variation du pH du tractus digestif (Ayral, 2009). Il agit comme agent détoxifiant ou inhibe la croissance d'agents pathogènes microbiens, pour ainsi améliorer le taux de conversion alimentaire (Prasai et al 2017). L’implication pourrait être attribuée à la possibilité que le charbon actif à la capacité d’absorber les toxines, les bactéries et certains gaz intestinaux (Leng et al 2013). Plusieurs études in vitro ont porté sur l’effet des biochars sur les fermentations ruminales et la production du méthane, mais les résultats sont contradictoires, car l’effet des biochars dépend de leurs caractéristiques, qui sont déterminées par la température de pyrolyse et le type de biomasse à partir duquel ils sont produits (Tomczyk et al 2020). Aucune étude dans notre environnement ne s’est intéressée à l’effet du biochar à base de coques de noix de coco sur la production du méthane chez les petits ruminants. C’est donc dans l’optique de fournir plus d’ information sur le sujet que la présente étude a été initiée avec pour objectif d’évaluer l’effet du charbon activé à base de coques de noix de coco sur les paramètres de digestibilité in vitro et la production de méthane chez les ovins et caprins.


Matériel et Méthodes

Zone de l’étude

La présente étude a été conduite d’Octobre à Décembre 2022 à Dschang dans le département la Ménoua et plus précisément à la Ferme d’application et de Recherche (FAR) de la Faculté d’Agronomie et des Sciences Agricoles (FASA) de l’Université de Dschang et dans l’Unité de Recherche de Production et de Nutrition Animales (URPRONAN) du même établissement. Dschang est une localité dont les coordonnées géographiques sont les suivantes : LN 5°36’- 5º44’, LE 9º85’-10º06’, altitude : 1392-1396 m.

Matériel animal

Pour ledit essai, une brebis Djallonké et une chèvre naine de guinée avec un poids moyen de 18±2 kg ont été achetées sur le marché de Dschang. Leurs âges ont été déterminés par l’analyse de leur dentition et variaient entre 18-20 mois. Elles ont servi de donneuses de liquide ruminal pour la digestibilité du foin de Trypsacum laxum associé à différents niveaux de biochar de coques de noix de coco.

Matériel végétal et Production du biochar

Le matériel végétal était constitué du Trypsacum laxum recolté recolté à la FAR et, des coques de noix de Cocos nucifera récoltées dans l’arrondissement de Santchou situé non loin de Dschang et utilisées pour la fabrication des charbons biologiques. Le fourrage a été récolté, préfané et séché à l’ombre puis conservé dans des sacs en jute.

Les coques de noix de coco ont été calcinées au feu de bois dans un four métallique pendant 3 heures de temps, ont subi un ensemble de processus (pyrolyse), et les braises ont été éteintes avec de l’eau potable. Le charbon obtenu a ensuite été séché au soleil pendant 24 heures, puis broyé et tamisé avec des mailles de 1 mm de diamètres. La poudre de charbon obtenue a ensuite été introduite dans une marmite en terre cuite, portée à haute température au feu de bois pendant 3 heures de temps (activation à la chaleur).

Analyse du biochar

La poudre de chaque biochar (50 g) a été prélevée et analysée au laboratoire de Médecine vétérinaire de l’Université Liège (Belgique) pour la détermination des fonctions de surface par la Spectrométrie Infrarouge à Transformée de Fourier (FTIR).

Préparation des rations

Quatre rations expérimentales ont été formulées à savoir:

Digestibilité in vitro
Préparation de l’inoculum et méthode utilisée
.

L’évaluation de la quantité de gaz produite et la préparation des réactifs ont été effectué selon la méthode décrite par Menke et al (1979). Pour chaque ration, 500 mg d’échantillons ont été pesés en triple puis, déposés au fond des seringues de digestibilité (une pour les caprins et une autre pour les ovins). A la veille de la réalisation de l’essai, les échantillons et la solution mère fraîchement préparée selon la procédure ci-dessus décrite ont été placés dans un incubateur pendant toute la nuit. Le matin avant la collecte des liquides ruminaux, la solution mère a été placée dans le bain marie à 39°C. Dans cette solution arrivait continuellement d’une bouteille de gaz un flux de C02dont la pression a été réglée à 4 bars. Le sulfure de sodium (417 mg) et le NaOH 6N (0,444 ml) ont été ajoutés à la solution mère. Les liquides ruminaux ont été collectés des panses des animaux juste après abattage. Ces liquides ont été immédiatement filtrés sous un flux de CO 2 qui arrivait continuellement. Pour la préparation de 2100 ml d’inoculum (pour chaque espèce) , 700 ml de chacun de ces liquides ont été prélevés séparément et introduits dans deux bouteilles de réactifs différentes contenant la solution mère toujours sous le flux de CO2. Ces mélanges (inoculums) ont été homogénéisés pendant 10 mn à l’aide d’un agitateur magnétique ; et 40 ml de ces inoculums ont été prélevés et injectés dans chaque seringue à l’aide d’un distributeur de précision; puis, l’ensemble a été placé dans le bain marie à 390c pour incubation.

Incubation

Après 24 heures d’incubation, les gaz produits et corrigés par les gaz des tubes témoins ont été utilisés pour calculer la digestibilité in vitro de la matière organique (DIVMO) en utilisant l’équation de régression de Menke et Steingass (1988). Quant à l’énergie métabolisable (EM), elle a été calculée selon l’équation proposée par Markkar (2002).

DIVMO (%) = 14,88 + 0,889 GP + 0,0651 C

EM (MJ/Kg MS) = 2,20 + 0,136 GP + 0,057 PB

GP = Quantité de gaz produit après 24 heures d’incubation ; PB = Protéine Brute ; C = Cendres

FC (mg/ml)= MOD/GP

Avec : MOD (mg) = Matière Organique Dégradée GP (ml) = Quantité de Gaz Produit après 24 heures d’incubation

MM (mg) = MOD – (GP×FS)

FS = Facteur stoechiométrique (2,20 pour les fourrages)

AGV (mmol/ml) = 0,0239 GP – 0,0601

A la fin de l’incubation, le contenu des seringues a été vidé dans des béchers de 600 ml. Ces seringues ont été rincées deux fois de suite avec deux portions de 15 ml de Neutral detergent Solution double (NDS) et vidé dans ces béchers. Les échantillons ont été portés à ébullition à feu doux pendant une heure et filtrés dans des creusets filtrants pré-tarés. Ces creusets ont été séchés à 103°C pendant une nuit puis pesés. La DIVMS a été obtenue par la différence entre le poids du substrat incubé et le poids du résidu non dégradé après le traitement au NDS à la fin de l’incubation à partir de la développée par Van Soest et Robertson (1985).

Analyse qualitative du gaz produit

Un volume de 40 ml du gaz produit a été transféré dans une autre seringue de digestibilité, dans laquelle a été ajouté 4ml de NaOH (10N). La soude fixe le CO2, ce qui entraine le déplacement de piston vers le volume de gaz restant qui est le méthane (CH4).

Mesure du pH

Immédiatement après l'analyse qualitative du gaz produit, environ 10 ml du contenu des seringues a été prélevé et introduit dans des boites pour détermination du pH à l’aide d’ un pH-mètre électronique de marque SANXIN, model pH5S.

Dénombrement et identification des protozoaires

Avant arrêt du processus de digestibilité in vitro, 5 ml du contenu des seringues a été prélevé, puis une coloration volume par volume au MFS (methylgreen-formalin-saline) a été effectuée. Le formaldéhyde permet la fixation des cellules et le vert de méthyle la coloration des noyaux (Ogimoto et Imai, 1981). Le dénombrement et l’identification des protozoaires ont été réalisés sur une cellule de Malassez.

Analyses statistiques

Les données de digestibilité in vitro,la production de méthane, le pH et la population des protozoaires ont été soumises à l’analyse de la variance (ANOVA) à un facteur, suivant le modèle linéaire général. Lorsque les différences existaient entre les traitements, les moyennes ont été séparées par le test de Duncan au seuil de 5%. Les données sur la digestibilité in vitro, la production de méthane, le pH et la population des protozoaires des rations étaient comparées entre les deux espèces (ovins et caprins) par le test « t » de Student au seuil de 5%. Le logiciel SPSS 20.0 (Statistical Package for Social Sciences) a été utilisé pour ces analyse.


Résultats

Effet de la source du liquide ruminal sur les paramètres de digestibilité in vitro; la production du méthane ; la population de protozoaires et le pH des différentes rations incubées avec le charbon activé de coques de noix de coco
Effet de la source du liquide ruminal sur les paramètres de digestibilité in vitro des différentes rations incubées avec le charbon activé de coques de noix de coco.

Le Tableau 1 présente l’effet de la source du liquide ruminal sur les paramètres de digestibilité in vitro des différentes rations incubées avec le charbon activé de coques de noix de coco. Il en ressort que le GP, l’EM, les AGV et la DIVMO produits par les deux liquides ruminaux incubés avec la ration témoin ont été les plus faibles et inférieurs ( p <0,05) à ceux de toutes les autres rations. Par ailleurs, la DIVMS de la ration FTl+CACn1 a été la plus élevée mais comparable (p>0,05) à celle produite par la ration FTl+CACn0,5.

Avec le liquide ovin, les valeurs de la MM et du FC produites par la ration témoin ont été supérieures (p<0,05) à celles de toutes les autres rations. L’azote résiduel n’a pas été influencée par l’ajout du biochar (p>0,05). Par contre, avec le liquide ruminal caprin Le FC de la ration FTl+CACn1,5 est supérieur (p<0,05) à celui de toutes les autres rations, la MM n’a pas été influencée par l’ajout du biochar. En ce qui concerne l’azote résiduel, la valeur produite par la ration témoin a été supérieure (p<0,05) à celles des rations FTl+CACn0,5 et FTl+CACn1, ces dernières ont été supérieures (p<0,05) à celle produite par la ration FTl+CACn1,5.

La comparaison des paramètres de la digestibilité in vitro des différentes rations en fonction de la source du liquide ruminal révèle qu’indépendamment du traitement, les valeurs du GP, de l’EM, les AGV et la DIVMO produites par le liquide ruminal caprin ont été supérieures (p<0,05) à celles produites par le liquide ruminal ovin ; Exception faite pour le GP des rations FTl+CACn1,5. Le MM et le FC de la ration témoin du liquide ruminal ovin ont été plus élevées que ceux du liquide ruminal caprin (p<0,05) ; l’observation inverse est effectuée avec les rations FTl+CACn0,5. Les valeurs de la DIVMS de la ration témoin n'ont pas été affectées (p>0,05) par la source du liquide ruminal. Dans les autres cas, les valeurs produites par le liquide ruminal caprin ont été plus élevées (p<0,05) que celles du liquide ruminal ovin. Les valeurs du N-NDF ont été comparables (p>0,05) pour les rations FTl+CACn1 et FTl+CACn1,5. Dans les deux autres cas, les valeurs du liquide ruminal ovin étaient plus faibles (p<0,05).

Tableau 1. Comparaison des paramètres de digestibilité in vitro des différentes rations en fonction de la source du liquide ruminal

Bilan azoté
(g/j)

Liquide
ruminal

Rations

ESM

p

FTl+CACn0

FTl+CACn0.5

FTl+CACn1

FTl+CACn1.5

GP après 24h
(ml/500mg)

Brebis

38.4±0.63dB

48.3±0.28bB

49.7±0.61aB

46.3±0.51c

1.32

0.00

Chèvres

42.7±1.47dA

50.8±0.92bA

53.1±1.1aA

48.3±1.2c

1.25

0.00

EM
(MJ/kg MS)

Brebis

8.15±0.08dB

9.50±0.03bB

9.68±0.08aB

9.22±0.06cB

0.18

0.00

Chèvres

8.74±0.2dA

9.84±0.12bA

10.2±0.15aA

9.5±0.16cA

0.16

0.00

MM
(mg)

Brebis

37.5±10.3aA

17.25±0.15bA

9.0±0.6b

29.1±0.3b

3.74

0.00

Chèvres

19.7±1.3B

9.4±1.6B

14.3±5.9

14.8±3

1.82

0.25

FC
(mg/ml)

Brebis

2.53 ±0.09aA

2.33±0.00bA

2.26±0.00b

2.33±0.03b

0.03

0.00

Chèvres

2.36±0.00bB

2.27±0.01bcB

2.3±0.04c

2.4±0.00a

0.01

0.00

AGV
(mmol/40ml)

Brebis

0.86±0.01dB

1.09±0.00bB

1.12±0.01aB

1.04±0.01cB

0.03

0.00

Chèvres

0.96±0.03dA

1.15±0.02bA

1.21±0.02aA

1.09±0.02cA

0.02

0.00

DIVMS
(%)

Brebis

56.1±1.26c

59.3±0.01abB

60.1±0.15aB

58.8±0.11bB

0.47

0.00

chèvres

55.8±0.97b

61.7±0.23aA

62.4±0.01aA

62.1±0.34aA

0.83

0.00

DIVMO
(%)

Brebis

55.5±0.56dB

64.4±0.25bB

65.6±0.54aB

62.6±0.44cB

1.17

0.00

Chèvres

59.4±1.3dA

66.6±0.82bA

68.7±0.98aA

64.4±1.07cA

1.11

0.00

NDF-N

Brebis

1.6±0.03B

1.55±0.02B

1.58±0.02

1.59±0.01

0.08

0.13

chèvres

1.78±0.03aA

1.65±0.03bA

1.56±0.04b

1.64±0.05c

0.02

0.00

a, b, c: les moyennes portant la même lettre sur la même ligne sont comparables (p>0,05) au seuil de 5%. A, B: les moyennes portant la même lettre sur la même colonne pour le même constituant ne sont pas différentes (p>0,05). FTl+ CACn0 (témoin) = foin de T. laxumnon associé au charbon activé ; FTl+ CACn 0,5= foin deT. laxum+ 0,5% de charbon activé d’eucalyptus / kg MS ; Tl+ CACn1= foin de T. laxum + 1% de charbon activé d’eucalyptus / kg MS ; Tl+CACn1,5= foin de T. laxum + 1,5% de charbon activé d’eucalyptus / kg MS ; ESM = Erreur standard de la moyenne ; p = Probabilité
Effet de la source du liquide ruminal sur la production du méthane ; la population des protozoaires et le pH des différentes rations incubées avec le charbon activé de coques de noix de coco


Figure 1. Effets du biochar et de la source du liquide ruminal sur la production du méthane, la population des protozoaires et le pH.
a,b: Les histogrammes affectés de la même lettre ne diffèrent pas significativement (p>0,05). FTl+ CACn0 (témoin) = foin deT. laxumnon associé au charbon activé ; FTl+ CACn 0,5= foin deT. laxum+ 0,5% de charbon activé d’eucalyptus/kg MS ; Tl+ CACn1= foin deT. laxum+ 1% de charbon activé d’eucalyptus / kg MS ; Tl+CACn1,5= foin deT. laxum+ 1,5% de charbon activé d’eucalyptus/kg MS

Il ressort de la figure 1 que la production du méthane, la population des potozoaires et le pH ont diminué avec l’ajout du biochar. Indépendamment de la ration considérée, la production du méthane, la population des protozoaires et le pH du liquide ruminal caprin sont plus élevées que ceux du liquide ruminal ovin. Exception faite pour le méthane produit par les rations FTl+CACn1 et la population des protozoaires enregistrée avec les rations FTl+CACn1,5 où les valeurs sont sensiblement égales. La population de protozoaires et le pH des rations FTl+CACn1 enregistrés avec le liquide ruminal caprin sont supérieurs (p<0,05) à ceux du liquide ruminal ovin.


Discussion

Quel que soit le liquide ruminal considéré, la production des gaz (GP) après 24h d’incubation a été statistiquement améliorée par l’ajout du biochar. Ces résultats sur la production totale de gaz se rapprochent de ceux de Qomariyah et al (2021) et de McFarlane et al (2017) qui ont obtenu dans leurs études respectives une augmentation de la production de gaz et des paramètres de digestibilité in vitro avec l’ajout du biochar obtenus à partir de différents types de biomasses. Le biochar est connu comme un bon matériau d’adsorption en raison de sa relation avec différents types de molécules. Une augmentation de la production de gaz peut indiquer un effet stimulant du biochar sur l’activité microbienne et la fermentation ruminale.

L’ajout du biochar a amélioré de façon significative l’énergie métabolisable (EM), les acides gras volatiles (AGV) et de la digestibilité de la matière sèche (MS) et de la matière organique (MO). Cette augmentation suggère que le biochar pourrait favoriser le développement d'une population microbienne ruminale plus efficace pour dégrader les aliments. Les changements dans la fermentation ne sont pas inattendus car les propriétés antimicrobiennes du biochar peuvent avoir un impact spécifique sur certains membres du microbiote du rumen (McFarlane et al 2017). Ces résultats sont en accord avec ceux de Qomariyah et al (2021) qui dans un essai in vitro ont amélioré la production des AGV et les autres paramètres de digestibilité en ajoutant du biochar à base de cabosses de cacao à la ration de base. Ces auteurs ont émis l’hypothèse selon laquelle cette amélioration résulterait de la nature poreuse du biochar, qui aiderait au logement des microorganismes environnants, ce qui peut entrainer une amélioration de la formation des biofilms et par conséquent une augmentation des paramètres de digestibilité (Leng et al 2013).

Des études relevant une diminution de la production de méthane comme la nôtre ont déjà été rapporté par Leng et al (2012a) qui sont parvenus dans un essai in vitro à réduire la production de méthane à hauteur de 14% avec du biochar fait à base de balles de riz. De même, Cabeza et al (2018) en utilisant des biochars fait à base de diverses biomasses végétales pyrolysées à différentes températures, ont enregistrés une réduction dans la production in vitro du méthane. Dans un essai conduit in vivo sur des bovins « jaunes », Leng et al (2012b) ont réussi à réduire la production de méthane de l’ordre de 23% en incluant 0,6% de biochar fait à base de balles de riz dans une ration de base constituée de racines et feuilles de manioc. Cet effet déprimant pourrait être attribué à la capacité de sorption des gaz du biochar en raison de sa grande surface interne (Lehmann et Joseph 2015 ), ou à la stimulation de la croissance microbienne et/ou à la stimulation des microbes méthanotrophes (Leng et al 2012b).

La présente étude a révélé une légère baisse du pH avec l’ajout du biochar, cette observation est en accord avec celles de Cabeza et al. (2018) qui ont utilisé des biochars fait à base de diverses biomasses végétales pyrolysées à différentes températures ; et de Qomariyah et al (2021) qui ont eux utilisé un biochar fait à base de cabosses de cacao, ces deux études ont enregistré une diminution du pH du contenu ruminal avec l’ajout du biochar dans des essais in vitro. Ces observations s’expliqueraient par la capacité du biochar d’améliorer les paramètres de digestibilité in vitro et par conséquent augmenter la production des Acides gras volatiles donc l’accumulation va entrainer une baisse du pH (Ayral, 2009).

Les paramètres de digestibilité in vitro de cette étude sont en faveur du liquide ruminal caprin, ces résultats sont similaires à ceux de Lemoufouet et al (2016) qui ont obtenus des différences significatives en faveur du liquide ruminal caprin entre les paramètres de digestibilité in vitro des rations à bases de chaumes de maïs traités à l’urée ou aux fientes de poules associés à la melasses ; et incubées avec les liquides ruminaux caprins et ovins. Ces observations se justifieraient par la teneur élevée en fibre du fourrage, selon Cobo (2007) la digestibilité de la matière sèche et des hydrates de carbones structurels des caprins, dans un régime hautement lignifié dépasse considérablement les performances des autres petits ruminants. Les chèvres sont plus tolérantes à la substance amère des ligneux due aux tannins que les brebis.


Conclusion

Il ressort de la présente étude que les paramètres de digestibilité in vitro ont évolué de manière variable indépendamment de la source du liquide ruminal. En effet, la production de gaz, l’EM, les AGV et la digestibilité de la matière sèche et de la matière organique ont été améliorés avec l’ajout du biochar dans la ration. Par contre, la production de méthane, le pH et la population de protozoaires ont diminué avec l’ajout du biochar. Les meilleurs résultats en fonction du niveau d’inclusion ont été obtenus avec le taux de 1 %. En plus, les paramètres de digestibilité in vitro produits avec le liquide ruminal caprin ont été plus élevés que ceux produits avec le liquide ruminal ovin. Il serait donc désirable de mener des essais de digestibilité in vivo pour apprécier l’effet de l’ajout du biochar à base des coques de noix coco sur l’ingestion et l’utilisation digestive du foin de Trypsacum laxum.


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